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Etudes : installation de gîtes artificiels sous des ponts

Certains ponts ne sont pas accessibles aux chauves-souris. Pour pallier l’absence d’anfractuosités favorables, la société des autoroutes APRR a sollicité le muséum il y a 5 ans pour y installer une trentaine de gîtes artificiels. Ils ont été conçus avec l’IUT de Bourges et faits pour durer sur des décennies en épais pin Douglas. Nous doutions au départ sur les résultats qui pouvaient déboucher de l’opération. La première année nous a donné raison : les nichoirs sont restés désespérément vides. Pourtant, la seconde année, ils ont révélé la présence de quelques individus. Au fil des ans, la colonisation a augmenté pour atteindre un taux de remplissage quasi complet en 2018. Six différentes espèces s’y succédaient et deux colonies de reproduction de Murins de Daubenton et de Murins à moustaches y faisaient même leurs petits. En 2019, nouvelle information intéressante, les deux canicules et l’extrême sécheresse qui ont touché le département du Cher ont vidé une grande partie des gîtes de leurs occupants. Il ne subsistait des chauves-souris que dans ceux situés au-dessus de l’eau.

Etudes : les chauves-souris sont-elles fidèles à leurs gîtes ?

Comme les hirondelles, au printemps, les propriétaires voient revenir leur colonie de chauves-souris. Les femelles vont s’installer dans les combles pour deux ou trois mois, élever leurs jeunes et s’en aller vers la mi-août.

Avec 1540 colonies recensées sur le département du Cher et 30 ans de recul, l’envie était forte de déterminer si ces animaux étaient fidèles à leur maison d’élection et si les diverses espèces montraient un comportement différent. Une étudiante en M2 de Biologie, Margot Jodet, s’est penchée sur le phénomène cet été. Nous avons choisi deux espèces : la pipistrelle et la sérotine, les deux chauves-souris les plus liées à l’homme avec respectivement 978 et 162 colonies recensées dans le Cher, un record européen ! Après de nombreux appels téléphoniques et de multiples sollicitations des propriétaires - dont nous pouvons remercier la patience et la disponibilité - nous avons collecté le maximum d’informations sur la présence ou non des animaux dans les charpentes. Après un brassage statistique des données, les résultats sont tombés. La plus fidèle sur le long terme est la sérotine commune, la pipistrelle semblant plus versatile. Mais dans les deux cas quand les colonies se montrent infidèles à leur site de mise-bas, elles s’installent très près de leur première demeure. En moyenne à 92 mètres pour les pipistrelles et à 130 mètres pour les sérotines.

Etudes : synthèse des colonies de chauves-souris de la ville de Bourges

Petit rhinolophe à Bourges

Dans le cadre d'une meilleure connaissance de la biodiversité urbaine, le muséum s'est lancé dans un vaste bilan qui reprend 30 ans de prospections sur les colonies de chauves-souris de la ville de Bourges. Cette synthèse ne devait initialement concerner que les nurseries de pipistrelle commune (et il y en a déjà près de 70 !) mais nous avons vite senti que le projet pouvait aller plus loin et nous y avons ajouté les caves du centre historique utilisées par le Petit rhinolophe. Mais pourquoi s'arrêter en si bon chemin ? Nous avons donc poussé le bilan encore un peu plus loin et repris toutes les colonies connues, toutes espèces confondues. Nous devrions maintenant dépasser 120 sites occupés par 10 espèces sur le territoire communal. La cartographie est entamée avec l’appui du SIG et l'équipe technique informatique donnant un gros coup de main. 

Le but final est maintenant de voir si  les Trames Vertes ressortent pour les Noctules ou les pipistrelles, les Bleues pour le Murin de Daubenton ou les Noires pour le Petit rhinolophe ou la Barbastelle. Pour les chauves-souris, quels sont les enjeux par rapport aux espaces verts, aux jardins, aux cours d'eau, aux marais, à l'illumination publique ? Bref, quand tout sera cartographié, en superposant avec les différentes couches lampadaires, arbres en ville, ou jardins, nous allons sans doute faire de belles découvertes pour mieux prendre en compte ces espèces dans le plan de gestion urbain de la Ville de Bourges. Pour les curieux, les premières cartes disponibles pour le petit rhinolophe et la pipistrelle commune sont accessibles sur internet.
 
Lien vers l'Atlas de la biodiversité à Bourges
 
Lien vers la Cartographie des observations (utiliser Firefox)
 

Etudes : le guano, une mine d’or d’informations

Les chauves-souris laissent tomber sous leurs colonies des crottes qui s’amoncèlent parfois jusqu’à former de jolies pyramides. Beaucoup savent que c’est un puissant et excellent engrais (1 cuillère à soupe par litre d’arrosage pour les plantes d’appartement ou 1 litre par an en volume, pour un mètre carré de potager). Mais le guano peut aussi servir à autre chose, une méthode douce pour étudier les colonies de mise-bas et comprendre un peu plus leurs évolutions démographiques.
Sur une série de colonies de Sérotines communes, le muséum a récolté cet hiver l’intégralité des déjections produites dans leur gîte l’été précédent. L’ensemble a été méticuleusement tamisé pour y rechercher la présence de cadavres, de l’embryon avorté au juvénile quasi volant. Les animaux ont été mesurés et classés par âge. Nous pouvons ainsi constater la mortalité juvénile avant la sortie de gîte et comparer les colonies entre elles.

Il est curieux de constater que chez la même espèce - la Sérotine commune - certaines colonies du Cher se sont reproduites sans mortalité, alors que d’autres, à quelques dizaines de kilomètres, ont perdu environ 15% de leurs petits.
Le guano est ensuite pesé, ce qui permet de mieux connaître l’appropriation d’un aménagement réalisé pour ces mammifères quand on les confine dans une partie des combles pour limiter la dispersion des crottes.

Etudes : incidence de la lumière sur les chauves-souris

Chacun sait que les chauves-souris sont des espèces nocturnes et qu’elles attendent patiemment que la nuit soit tombée pour reprendre leurs activités. Si les chauves-souris n’apprécient pas la lumière, elles ne sont pas aveugles pour autant et leur sensibilité est même plus grande que la nôtre quand la lumière devient très faible.

Pour mieux appréhender le comportement de ces animaux face aux éclairages, le Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN) mène actuellement une étude sur l’impact de la pollution lumineuse sur le rythme d’activité des chiroptères en sortie de gîte de reproduction et sur la dynamique des populations. Des colonies de trois espèces ont été sélectionnées à l’échelle de plusieurs régions françaises. Les espèces retenues sont notamment connues pour montrer une tolérance à la lumière bien différente. Les Sérotines communes sont peu lucifuges, contrairement aux Grands rhinolophes et aux Murins à oreilles échancrées qui évitent autant que faire se peut le moindre éclairage. Le MNHN, associé au Muséum de Bourges, étudiera cet été 2021 une trentaine de colonies de Sérotines communes réparties sur l’ensemble du département du Cher.

Ce n’est pas non plus un hasard si une partie de l’étude se tient dans le Cher : avec 1540 colonies recensées toutes espèces confondues (un record en Europe), il y a le choix pour que les écologues du Muséum national puissent sélectionner des échantillonnages représentatifs. L’étude consistera à réaliser des enregistrements simultanés des niveaux de lumières avec des luxmètres et de l’activité des chiroptères avec des détecteurs à ultrasons. 

Eclairage de l'église de Saint-Eloy-de-Gy

Vol de chauves-souris à la lumière d'un lampadaire

Cette vaste étude s’inscrit dans le cadre d’un programme lancé par le MNHN. Elle ne pourrait une fois de plus se dérouler sans la participation active de tous les propriétaires de colonies et permettra de mieux appréhender à partir de quel seuil d’éclairage artificiel il est possible de noter une influence sur l’heure de la sortie des chauves-souris.

Observe-t-on des changements de comportement face aux différents types d’éclairage, qu’ils soient naturels, comme celui de la lune, ou artificiels ? Y a-t-il des variations du comportement lucifuge au sein des espèces étudiées ?

Le programme se déroulera jusqu’en 2022 et promet de longues nuits sous les étoiles pour toute les équipes impliquées.

Voir la liste de l'ensemble des publications chauves-souris du muséum

Sérotines communes, juvéniles et adultes

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